PAPIN 1690
Mathématicien et médecin français
(Blois 22 Août 1647, Londres 1712 ? )
Né dans les environs de Blois, et issu d'une famille bourgeoise, Denis Papin suit les cours d'une école jésuite avant d'étudier à l'université d'Angers et de décrocher un diplôme de médecine tout en montrant des dispositions et un intérêt prononcé pour la physique. Reçu « docteur » vers 1669, on le retrouve deux ans plus tard comme curateur auprès de Christiaan Huygens (l'inventeur du pendule... qui régule les horloges et fait tic tac !), qui dirige alors l'Académie des Sciences au Louvre. En 1673, il travaille auprès de Gottfried Leibniz (la conservation de l'énergie...), du même âge que lui, qui restera son ami et son correspondant. Ses expériences portent sur le vide. A 27 ans, son premier mémoire " les nouvelles expériences sur le vide, avec la description des machines qui servent à l'obtenir ", fait la description d'une première machine à faire le vide à moindre prix, car elle n'utilise pas de « vif argent » (mercure). On y découvre un savant marqué par la méthode cartésienne, et un inventeur ingénieux, qui met facilement ses théories en application en construisant des machines.
A partir de 1675, Papin qui est calviniste, devance la révocation effective de l'Édit de Nantes, et part pour Londres, avec une recommandation du néerlandais Christiaan Huygens (le pendule et des étoiles...). Il y rejoint assez vite les travaux de l'Irlandais Robert Boyle (loi sur les pressions, et l'interaction des atomes), qui atteint par la goutte, trouve en Papin un assistant idéal pour reprendre l'étude des propriétés de l'air. Papin construit une nouvelle machine à faire le vide, puis un fusil à air comprimé.
En 1679, Papin fait l'évènement, avec le Digesteur. C'est un cylindre de fonte très fort, dans lequel on peut faire monter la pression de la vapeur, sans redouter une explosion, grâce à la soupape de sûreté. Cette machine aujourd'hui nommée autoclave, (ou cocotte-minute, suivant l'application qu'on lui donne), permet à Papin de conduire toute une série d'expériences à très hautes pressions pour l'époque (entre 8 et 20 bars). Le digesteur possède les attributs principaux de la chaudière, même si, pour l'instant, Papin ne destine pas le digesteur à la production vapeur en grosse quantité. Papin voit dans son invention, un outil pour lutter contre la faim. En effet, le digesteur rend comestible les bas morceaux de viande, y compris les os qu'il transforme en gelée. Papin, peu porté sur le commerce, échouera à tirer un revenu significatif de son invention. Le mémoire : "A new Digester or Engine for softning bones, containing the description of its make and use in these particulars, &c° " fait, cependant, la notoriété de Denis Papin à Londres. Boyle se sent autorisé à proposer le savant français comme membre titulaire de la Royal Society de Londres, ce qu'elle accepte en décembre 1680. Malgré la révocation de l'Edit de Nantes en 1681, le mémoire parait en français à Paris en 1682 sous le titre "La manière d'amollir les os & de faire cuire toutes sortes de viandes en fort peu de temps à peu de frais ; avec une description de la machine dont il faut se servir pour cet effet."
Machine à transporter au loin la force des rivières : vers 1687
Entre 1682 et 1684, on ne garde pas de trace des travaux de Papin à Venise, où sur l'invitation du diplomate Sarroti, il a été invité à venir y fonder une académie des sciences, chose certainement difficile dans la ville des Doges, où il régnait alors une grande instabilité politique. Papin est de retour à Londres en 1684, et il retrouve son poste et ses appointements à la Royal Society. Ses travaux continuent à tourner autour des mêmes thèmes de l'eau, de l'air, de la conservation des aliments et du nettoyage du linge en mer. La principale invention de Papin à cette époque se nomme "Machine à transporter au loin la force des rivières".
Fonctionnement de la première machine à vapeur à piston, 1690.
En 1690, Papin fait paraître un article dans les « Actes des érudits de Leipzig», intitulé « Nouvelle manière de produire à peu de frais des forces mouvantes extrêmement grandes ». Papin a eu l'idée de condenser de l'eau, pour créer un vide parfait. L'appareil expérimental est un simple cylindre/piston de deux doigts de diamètre (4cm), dans lequel il met de l'eau avant de le placer sur le feu, et qui finit par soulever un poids de 60 livres (30kg). Un cran d'arrêt ayant maintenu le piston en position haute après l'expansion de la vapeur, il suffit de le relâcher après refroidissement pour déclencher toute la force de la pression atmosphérique, de façon régulière et continue, sur toute la course du piston. Avec cette invention peu spectaculaire mais néanmoins capitale, Papin franchit une nouvelle étape dans le chemin qui mène à la machine à vapeur moderne. C'est ce principe que Thomas Newcomen reprendra pour élaborer la première véritable machine à vapeur industrielle en 1712. Mais en 1690, seul Papin pressent les prolongements de son invention, conscient des forces qu'il peut déclencher, en utilisant des tubes de plus gros diamètre, car dit-il « la pression augmentera ainsi de suite en raison du triple des diamètres ». Il réclame dès lors « une manufacture pour fabriquer aisément des tubes légers, et d'un diamètre régulier », car dit-il, sa machine démontre que « des tubes ainsi faits peuvent très commodément s'employer à plusieurs usages importants ». La suite et fin de l'article, décrit le premier bateau à roues à aubes motorisé, tel que l'imagine le savant : quatre cylindres pneumatiques, agissant l'un après l'autre, sur l'axe transversal de deux roues à aubes, placées de chaque côté de la coque.
Elle met en application le principe du "chemin atmosphérique" (transmission du vide, pour l'utiliser à distance), et elle inclut un dispositif de distribution du vide, nommé "robinet à 4 voies". Ce dispositif extraordinaire de simplicité, sera repris ultérieurement dans les premières machines à vapeur, pour distribuer la vapeur. L'idée de distribuer l'énergie du vide sera reprise ultérieurement, et permettra le développement en ville du petit artisanat.
En 1688, après plusieurs excursions en Allemagne, Papin rejoint Marbourg définitivement, où l'intervention du Landgrave de Hesse lui a permis de trouver une chaire de professeur de Mathématiques. Malgré ses espoirs du début, il échoue à intéresser ses élèves "aux mathématiques et à la pneumatique". Peu à peu, les élèves délaissent ses cours. Mais sa renommée est grande, et rien ne le freine, pas même l'argent, dans la poursuite de ses expériences.
On peut considérer que le cylindre pneumatique est la première machine à vapeur de l'histoire, car c'est le premier système à créer un décalage de pression de 1 atmosphère entre chaque face du piston, et à transformer cette force créée en énergie mécanique.
Entre septembre 1690 et mai 1692, Papin a le soutien du Landgrave pour travailler sur deux modèles de sous-marin, afin de continuer les essais de barque plongeante du hollandais Drebbel. Le premier modèle de Papin est un cube de fer étanche très renforcé, dans lequel est installé une pompe à air, permettant de le pressuriser avant sa mise à l'eau. La démonstration devant la cour tourne à la catastrophe : le sous-marin était si lourd que la flèche de la grue se rompt, et endommage irrémédiablement l'appareil, provoquant la risée de l'assemblée. Moins d'un an plus tard, Papin termine la construction du second modèle, auquel le savant a apporté plusieurs améliorations capitales. Papin fait la description de « Urinator » dans les « Actes des érudits de Leipzig ». C'est un tonneau ovale, qui résiste naturellement par sa forme à la pression extérieure de l'eau, lorsqu'il est immergé. Une pompe à air centrifuge reliée à deux tuyaux de cuir maintenus à la surface par une vessie flottante, envoi de l'air pur à l'intérieur de l'habitacle, tandis qu'un baromètre mesure la différence de pression entre l'intérieur et l'extérieur. Un dénommé Haes, correspondant ou espion de Leibniz, fit un compte rendu circonstancié de l'essai du submersible, un jour de mai 1692. Papin, accompagné d'un acolyte courageux, a fait plonger le bateau, puis il l'a fait évoluer sous les eaux de la Lahn. Si un sous-marin est un appareil mobile, permettant d'assurer indéfiniment la respiration de l'équipage sous l'eau, on peut considérer que Urinator fut le premier sous-marin de l'histoire.
Vers 1695, Papin devenu le médecin personnel du Landgrave de Hesse, quitte Marbourg pour le château de Cassel. Le seigneur veut pour son château des jets d'eau et des miroirs, tout comme Louis XIV à Versailles. Après quelques hésitations, c'est à Papin que revient ce défi. Papin relate avoir construit une machine à élever l'eau, sur le modèle de celle de Savery, mais qui fut emportée par les glaces, lors d'une débâcle. Suivent de nombreuses inventions et constructions : un pressoir à cidre pneumatique, une machine à conserver les jus de fruits par échauffement puis maintien sous vide, un soufflet géant pour l'aération des mines, un alambic à air comprimé, un four à air pulsé pour améliorer la fonte du verre, une lanterne sous-marine pour attirer les poissons, un four à pain utilisant une meilleure circulation d'air, une machine améliorant drastiquement l'évaporation de l'eau de mer et la production de sel, des coussins et matelas pneumatiques, un lance-grenade pneumatique...
En 1704, Papin termine la construction d'un bateau à roues à aubes. On ne sait pas grand-chose du système mécanique qui l'équipe, sinon que le Landgrave de Hesse, avec qui Papin a essayé la machine, en fut très impressionné.
En 1707, Papin rend compte d'une machine à pomper l'eau, par la force de la vapeur dans un dernier mémoire, intitulé "nouvelle machine à élever l'eau, par la force du feu".
Seconde machine à vapeur de Denis Papin
Dans un cylindre, la vapeur surchauffée par des fers rouges pousse un flotteur, sous lequel se trouve l'eau à pomper, qui est repoussée à travers une cornue, dans un réservoir supérieur, cylindrique et hermétique. Lorsque l'eau pompée s'y trouve en quantité suffisante, l'air emprisonné fait pression, et on peut ouvrir un robinet en bas de ce vase pour laisser l'eau sous pression s'échapper, et mettre en mouvement une roue à multiples ailettes, dont l'axe est commun avec celui d'une meule. Papin a prévu d'installer cette machine au-dessous du niveau de l'eau à pomper, afin que l'entonnoir d'alimentation se remplisse tout seul, et cette machine est donc adaptée pour être installée à bord d'un bateau.
Mais les ennemis de Papin sont alors nombreux en Allemagne, et leur vindicte se déchaîne, à la suite d'une nouvelle expérience d'artillerie, au cours de laquelle l'explosion d'un canon aurait fait plusieurs victimes. Dans un courrier à Leibniz, Papin dit maintenant craindre pour sa vie, et il veut gagner Londres, afin de poursuivre ses expériences de bateau dans des eaux plus profondes. En septembre 1707, il met toutes ses affaires dans son bateau à roues à Aubes, et il descend la Fulda depuis Cassel jusqu'à la Weser, où des mariniers le contraignent de stopper (il y avait un péage !). Après quelques jours de tergiversations, alors que Papin et sa famille s'apprêtent à repartir, les mariniers s'emparent du bateau à aubes et de la machine, et le mettent en pièces. Papin part alors seul pour Londres, où 20 ans après avoir quitté la Royal Society, il espère retrouver sa place, et poursuivre ses expériences. Cruelles illusions, car Boyle mort, c'est le règne de Isaac Newton (celui de la pomme qui lui tombe sur la tête pendant sa sieste : la gravitation universelle !), qui dédaigne l'avance technologique de Papin, lequel réclame pourtant de travailler en collaboration avec Thomas Savery, afin de retirer le meilleur de leurs expériences.
L'opposition Newton / Papin et analysable sur deux caractères très différents. Newton est un dominateur, on dit même que certaines "lois" de Newton ne sont pas de lui ! Il a fait une superbe analyse de la mécanique et des forces. C'est un théoricien physicien ! Papin était médecin, plus près des personnes. Ses recherches étaient dans le but que tout le monde puisse manger (le "digesteur" rendait mangeable des parties trop dures de certaines viandes. Ce procédé est toujours utilisé ! ) Ses études sur la force de la vapeur sont une dérive de l'étude précédente.
Le médecin termine alors sa vie d'inventeur avec de petites inventions. Il met à jour l'intérêt sanitaire de renouveler l'air dans les appartements (tient en 1710, le covid déjà ???). Il a d'autres idées, mais il refuse d'en faire part, de peur qu'on les lui vole (tient, déjà encore ! ).
Finalement, ses appointements diminuent de plus en plus. On finit par perdre la trace du savant à Londres vers 1712. Plusieurs biographes pensent que Papin s'est éteint, sans fortune, dans un bas quartier de Londres. La date de sa mort se situe certainement entre 1712 et 1714.
Cent ans plus tard, cette découverte a été reprise par Watt pour améliorer sa machine. Seule, cette découverte ne pouvait être utilisée car trop peu puissante. La différence de pression est de 1 atm alors qu'une chaudière donne 4 à 5 fois plus et même 15 fois plus pour les dernières locomotives vapeurs (pour 70 bars dans un moteur diesel !)